L’ascension du Maroc dans le football n’est plus un phénomène ponctuel lié à un exploit isolé. Ce que nous observons aujourd’hui ressemble davantage à la mise en place d’un projet national mûri, assumé et pensé pour durer. Le secret n’est pas une révélation spectaculaire, mais un ensemble de décisions stratégiques qui ont fini par transformer le paysage footballistique du pays.
Le premier changement — sans doute le plus décisif — est la transformation de la mentalité. Le Maroc a cessé de considérer le football comme une simple passion populaire. Il l’a intégré à sa vision de développement : infrastructures modernes, terrains homologués, centres de formation structurés, et volonté politique claire de faire du football un outil de rayonnement. Cette nouvelle approche donne une cohérence que le Maroc n’avait jamais réellement atteinte auparavant.
L’Académie Mohammed VI constitue l’autre pivot essentiel de cette mutation. Elle n’est pas un symbole, mais un laboratoire de formation où se construit une nouvelle génération de joueurs. Ce qui s’y cultive, ce n’est pas seulement le talent, mais une manière de penser le jeu : discipline, compréhension tactique, rigueur mentale. Les Hakimi, Ounahi, En-Nesyri ou encore Bounou sont les ambassadeurs visibles d’un travail de l’ombre long et minutieux.
Un troisième facteur donne au Maroc une richesse unique : sa diaspora. Alors que de nombreux pays tentent de séduire des binationaux, le Maroc, lui, ne fait qu’accueillir des enfants qui n’ont jamais cessé de se sentir marocains. Ils apportent avec eux la formation européenne, l’intensité des grands championnats, mais aussi une identité affective forte. Ce mélange crée un profil de joueur souvent plus mature, plus habitué à la pression et plus à l’aise avec les exigences du haut niveau.
L’arrivée de Walid Regragui a permis de mettre de l’harmonie dans cet ensemble. Son approche repose sur une idée simple : jouer avec conviction. Il a redonné au joueur marocain la liberté d’oser, tout en exigeant discipline et cohésion. Sous sa direction, la sélection a cessé de subir pour commencer à imposer son rythme, son style et ses ambitions.
Enfin, le public marocain, massif, fidèle, intense, doit être considéré comme un élément constitutif du projet. Sa présence en coupe du monde, en CAN, et même dans les stades européens crée une atmosphère que peu de nations peuvent reproduire. Le football marocain joue rarement “à l’extérieur” : il transporte sa maison avec lui.
Ainsi, la question n’est plus de savoir si le Maroc peut rester dans le cercle des nations compétitives. La vraie question est désormais : quelle sera la prochaine marche ?
Car lorsqu’un pays combine volonté politique, formation solide, diaspora engagée et public incandescent… il n’avance pas, il s’élève.
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